SERIE #DIRCOMMCONFINES
​#INTERVIEW4

EPRESSPACK LANCE LA SÉRIE #DIRCOMMCONFINES  

Quelles sont les urgences des directeurs de la communication ? quelles seront leurs priorités et leurs actions de ces prochaines semaines ? à quoi ressemble une journée de dircomm confiné ?... Parce que la crise sanitaire mobilise la fonction communication dans des conditions d’exercice compliquées, Epresspack est allée sonder les professionnels de la communication et du marketing confinés qu’elle accompagne quotidiennement. 

« Il faut tenter des choses et ne pas être craintif »

 


Directrice Marketing et Communication et membre du comité de direction de la PME française bien connue, Le Slip Français, Caroline Tiquet anime une équipe d’une dizaine de personnes en charge du marketing (animation commerciale, marketing produit…), de la com corporate (réseaux sociaux, RP) et de la « fabrique » créative qui conçoit les contenus de la marque. Diplômée du CELSA (Master 2 en Management et Communication Interculturels et d’un Magistère en Communication), Caroline, 34 ans, était précédemment Directrice du Développement & Communication de l’agence de publicité Havas Paris. Après une début carrière chez SFR en tant que chargée de communication, elle rejoint l’agence i&e (Opinion Valley) pour gérer des budgets de communication globale notamment dans le secteur de la grande consommation. Caroline Tiquet est par ailleurs intervenante au CELSA. 

1/ A quoi ressemble une journée type de #dircommconfiné.e pour le Slip Français ? 

C'est plutôt intense, mais au fond c’est comme d’habitude, des conf, des call, sauf qu’on est chez soi. Ce qui est nouveau quand même et qui me touche, c’est le décor de vie des uns et des autres et tous ces petits accidents de communication qui créent une forme d’intimité, les enfants qui crient ou le bruit de la machine à café qui couvre la voix. Il y a aussi une autre bonne surprise à cette astreinte, c’est le gain de concentration. Quand on raccroche, plus personne pour vous déranger ni vous interrompre. Et bien que ce soit l’urgence sur beaucoup de sujets, j’arrive à traiter les sujets de fond. Au milieu de ces journées studieuses, il y a bien sûr les récréations. Je me connecte à la chaîne slack #wewillsurvive, que des salariés ont eu la bonne idée de créer de façon totalement spontanée. On y partage des blagues, des recettes, des vidéos drôles…. Ca apporte un peu de légèreté. Et pour rester en mouvement je n’échappe pas à la caricature de l’urbaine confinée, je  fais du training Dynamo, de la gym suédoise… le tout en live et je cuisine des desserts. On n’est plus à un paradoxe près. 

2/ Vous dites créer des « vêtement honnêtes », vous pourriez nous expliquer ? 

Nous fabriquons des vêtements « bons pour soi, bons pour le monde et pour tout le monde ». Quitte à produire des vêtements neufs – qui engendrent inévitablement des impacts écologiques - autant commencer par ceux qu’on n’est pas, ou pas encore, prêt à acheter d’occasion. Nous privilégions les matières locales, écologiques et recyclés. Le vêtement « honnête » ca résume un peu tout cela, la responsabilité, l’éco-conception et l’utilité de vêtements fonctionnels, pensés pour le confort. 

3/ En quoi l’arrêt brutal de la consommation vous impacte-t-il ? 

L’activité retail s’est arrêtée du jour au lendemain avec la fermeture de nos 22 boutiques le 16 mars dernier. Nous perdons ainsi 40% de notre chiffre d’affaires et toute l’entreprise est au chômage partiel. Seule notre activité de e-commerce continue même si les délais de livraison ont été rallongés par l’application des mesures de protection de nos équipes en ateliers et en entrepôt. 

3/ Nous entrons dans la 6ème semaine de confinement, pouvez-vous nous expliquer comment s’est passée la comm dans votre entreprise ?  

Très vite, nous nous sommes demandés comment nous pouvions être utiles et avons décidé de soutenir la fabrication de masques de protection. Nous avons coordonné nos ateliers volontaires et fait don aux ateliers réquisitionnés de nos stocks résiduels de tissu. Nous avons aussi fédéré et équipé plus de 650 fabricants et fournisseurs en outils numériques collaboratifs pour produire plus de 10 millions de masques en mars et avril et 1 million de surblouses qui sont destinés aux employés en première ligne de la grande distribution ou la gestion des déchets. Sur le plan de la comm interne, nous avons conservé les formats de réunion existants pour ne pas créer de rupture. Et nous avons lancé de nouveaux formats comme Radioslip (en référence à la radio Londres pendant la guerre), dans laquelle Guillaume Gibault donne tous les soirs, sur un mode détendu, les nouvelles sur l’activité et l’état des troupes. Pour l’externe, nous avons créé un journal de bord quotidien incarné par Guillaume, pour raconter notre implication dans la fabrication de masques. Nous l’avons relayé sur nos réseaux sociaux et assorti d’une LIVE Instagram qui a eu beaucoup de succès. Nous avons aussi revu notre production de contenus pour laisser plus de place aux sujets de fond en créant deux newsletters corporate et produits à l’adresse de notre communauté de clients, partenaires, journalistes… Les taux de clic, les taux d’ouverture ont été très satisfaisants jusqu’à générer des ventes en augmentation de 57%. Comme quoi le contenu utile et bien fait peut s’avérer un booster commercial immédiat. Coté PR, il n’était pas question d’un quelconque communiqué qui aurait été indécent, les newsletters et les réseaux sociaux ont fait le job et les journalistes sont venus à nous naturellement. Sinon, nous avons considérablement réduit les budgets en acquisition et webmarketing.  

4/ Comment envisagez-vous la suite du confinement et les mois qui viennent ? 

Cela peut paraître paradoxal mais je suis optimiste. Notre ambition au Slip Français c’est de réinventer l’industrie textile et je suis convaincue que l’élan collectif de toute la filière textile mode et luxe va continuer et aller dans ce sens. En termes de communication, on restera sur notre ligne, porter haut et fort nos engagements à travers nos produits, ce qui nous aidera, je l’espère, à résoudre l’enjeu du déstockage des prochaines semaines. Et puis nous sommes en train de réfléchir sur la façon d’accompagner et de soutenir la réouverture des boutiques, avec quel ton, quels messages et quelles opérations. Enfin nous allons profiter de cette période un peu creuse d’avant 11 mai, pour réaffirmer nos valeurs et avancer notre campagne Manifeste dans la presse. 

5/ Le secteur textile est l'une des industries les plus polluantes au monde. Comment voyez-vous le monde d’après dans votre secteur ? 

Il n’est pas impossible que les gens trouvent encore plus insensé de porter des sous-vêtements qui ont parcouru des milliers de kms avant d’arriver chez eux. La prise de conscience initiée avant la crise du COVID-19, va très probablement se renforcer. Les gens voudront mieux consommer et plutôt au profit de marques positives, honnêtes et soucieuses de l’intérêt collectif. Tout porte à croire que consommer deviendra un acte politique et culturel à part entière. 

6/ A titre personnel ou professionnel, quels sont les enseignements que vous tirez de cette crise hors-norme ?

Comme dans toute crise, il faut avancer avec discernement, garder la tête froide et en même temps cette crise inédite, sans référentiel, nous a incités à accepter une grande part d’improvisation. L’urgence, c’étaient les masques, on n’avait pas d’atelier en propre mais 29 ateliers partenaires qui ont été impressionnants de réactivité. On a tout mis en stand-by et on y est allé. Il faut tenter des choses et ne pas être craintif. 

7/ Et sinon, vous pensez toujours que le bonheur est dans le slip ?  

Le Slip Français s’est construit sur une idée folle. 10 ans plus tard, nous sommes toujours là. Le panache paie et ça nous pousse à aller de l’avant. Donc oui, si on veut changer la mode et le monde, il faut commencer par le Slip !

A propos du Slip Français 

Le Slip Français est une PME française, qui fabrique et distribue des vêtements (sous-vêtements, vêtements, nuit, bain, accessoires) entièrement pensés et confectionnés localement. Fondée il y a 9 ans par Guillaume Gibault entrepreneur engagé, le Slip Français est né d’une conviction sociétale affirmée : accompagner les nouveaux modes de consommation et de production pour favoriser le local, l’emploi, le savoir-faire et la transmission. La marque, qui est distribuée dans 22 boutiques en propre, réalise 60% du son chiffre d’affaires par le biais du e-commerce et réalise un chiffre d’affaires total de 22 ME en 2019. La PME emploie directement 115 emplois au siège et 220 personnes dans les 29 ateliers de confection partenaires.