Intelligence artificielle et communication : Comment se préparer à l'avènement de cette technologie et ses bouleversements dans le métier des RP ? 

TABLE RONDE (29/2/2024) 
epresspack x L'Association Nationale des Communicants 

L’adoption est massive et la démocratisation fulgurante. L’IA générative et le lancement de Chatgpt constituent une révolution pour les métiers de la communication. Devant la multiplicité des solutions technologiques, généralistes et spécialisées, les communicants doivent aller très vite : appréhender les outils, comprendre les enjeux nouvellement posés qui concernent des domaines aussi larges que la marque, la data et la souveraineté des données, la propriété intellectuelle, l’éthique, la communication de crise, la représentation, l’impact environnemental, la montée des compétences et même le dialogue avec les agences de communication ou la relation aux consommateurs. Ils doivent également poser des règles et les faire respecter tout en bâtissant une organisation adaptée. Dans ce nouveau contexte, la direction de la communication a un rôle crucial à jouer si elle veut profiter pleinement des effets facilitateurs de la technologie sur la production de contenus et plus largement, la réputation de l’entreprise.

Retrouvez le résumé de la table ronde organisée en partenariat avec L'association Nationale des communicants le 29 février 2024 ainsi que l'intégralité de l'événement en replay vidéo.  

Anne Imbert, Orange

Orange a complètement intégré l’IA dans ses métiers pour optimiser le réseau et les usages. Appliquée à la communication, l’IA générative a bousculé les pratiques de l’opérateur qu’il s’agisse de générer des visuels, des vidéos … Entreprise d’innovation et de technologie, Orange a fait le choix de familiariser l’ensemble des 140 000 salariés à cette technologie et de mettre à leur disposition des outils, en particulier ce qu’ils appellent un « bac à sable » sécurisé qui offre la possibilité de générer librement des images. Sur l’intranet, le système Open AI est ainsi l’espace le plus utilisé par les salariés, signe d’une appétence pour la créativité et d’une envie de faciliter leur métier.

Toutefois, la direction de la communication s’est aperçue que les visuels ne respectaient pas la charte graphique, qu’il existait des biais cognitifs et que se posaient la question de la propriété intellectuelle, des droits, de la représentation mais aussi de l’impact environnemental. Car générer une image c’est autant d’énergie consommée que de recharger son smartphone ! De ce fait, la direction de la communication – à l’épreuve des faits – recommande de poser un cadre, une charte et des règles

« Oui c’est une révolution, non on ne reviendra pas en arrière » explique Anne Imbert.  Selon elle, l’IA peut faciliter les métiers et les usages mais cela ne peut se faire sans mener les bonnes réflexions, définir un cadre, une règlementation et accompagner le mouvement par des formations.

L’IA constitue selon Anne Imber, une formidable opportunité pour la direction de communication, celle de reprendre la main sur des enjeux stratégiques, de rappeler ce qu’est une marque, une tonalité, de poser les règles et redéfinir la relation aux agences de communication prestataires. Chez Orange, une mention obligatoire est ainsi apposée à l’ensemble des créations texte ou images générées par l’IA et un comité d’éthique est régulièrement consulté.  

Son conseil aux communicants : aller vite dans l’appréhension des outils, la compréhension des enjeux nouvellement posés, la mise en place d’une organisation et le respect des règles. Sans oublier de développer le sens critique et d’aiguiser son œil pour faire face à la subtilité de la loi, de l’image, du texte… quand tous les acteurs ne feront pas oeuvre de transparence pour distinguer ce qui émane de l’IA ou de l’humain.

Laurent Pavillon, Global Head of business services chez BNP Paribas Real Estate

Pour lui, l’IA, comme toutes les nouvelles technologies avant elle, devra être encadrer. Elle doit être réglementée et sans attendre il faut commencer par anticiper et organiser en amont son déploiement dans le monde de l’entreprise.

Le 1er sujet qui se pose, c’est bien celui de « ranger sa chambre ». Les référentiels doivent être organisés autant pour les datas de l’entreprise, les datas particulières que les datas de la communication. Il ne peut y avoir de IA si par exemple, les communiqués de presse ne sont pas structurés, organisés avec un référentiel validé qui garantisse le style et le ton de la marque avec en bout de chaine, un contrôle qualité. L’IA pose pour les directions de la communication, une question d’organisation de la documentation et de la production de contenus (images, textes…) et plus précisément le knowledge management

L’IA nécessite également une expertise garantie et un contrôle qualité au moyen d’un œil expert in fine de toute production que ce soit systématique ou périodique. Elle pose au passage la question de la transformation. Selon lui, La gouvernance de l’IA est un sujet clé touchant de nombreuses fonctions dans l’entreprise . Un comité de l’IA a été créé avec des juristes, de la compliance, des risques…et bien sur les métiers pour veiller à un développement maitrisé tout en  acculturant les collaborateurs

L’IA pose également le sujet crucial pour les communiquants des deepfakes et de la communication de crise générées par un écosystème dans lequel tous les acteurs seront augmentés,  où l’IA sera utilisée avec plus ou moins de bienveillance et d’honnêteté. Les communicants vont se retrouver en position de défendre de fausses communications, de faux communiqués, qui auront tous les attributs de la marque mais qui seront générés en qqs secondes par une IA débridée, politisée.

A terme, submergée potentiellement par les situations de crise, la direction de la communication risque d’être pénalisée par un manque réactivité et doivent donc anticiper ce risque .  Sur un plan plus sociétal, l’IA va permettre aux citoyens, salariés, consommateurs de s’accélérer et d’accéder à des informations qu’ils n’avaient pas avant augmentant par la même leur contre-pouvoir ou leurs différentes contestations.   

Dernier sujet, l’IA, sujet cœur pour l’entreprise, nécessite une montée en compétences des collaborateurs face à la rapidité du déploiement et de son utilisation. Les communicants devront être en capacité de converser avec la machine et de processer les formations. Chez Orange, les 1500 communicants bénéficient de formations d’acculturation et de formations Prompt dédiées aux graphistes et designers, quand un site dédié à la marque met à disposition tous les assets et les guides lines.

L’organisation est aussi un point clé : identifier des référents dans tous les pays pour mettre en place une vraie organisation. Outre des référents dans chaque pays,  la direction de la marque Orange dialogue avec un comité IA piloté par un Chief IA Officer et le comité éthique RSE renforcé par la direction juridique.

L’IA va questionner enfin la relation aux agences et à tout l’éco-système de prestataires et en particulier la question de la rémunération des services et des agences pour certaines prestations historiques. Quelle est la valeur d’un film généré en 2 minutes par l’IA quand avant, l’annonceur investissait des centaines de milliers d’euros pour créer un film. L’agence va-t-elle devenir une agence de super-prompteurs ? Qu’est ce qui va les différencier ? L’art de prompter !

REVOIR L'INTEGRALITÉ DE L'EVENEMENT :